Face à l’ampleur de la criminalité des gangs, aux pénuries généralisées alimentaire, de carburant et d’autres produits essentiels, ainsi qu’à la profonde désaffection de la population, le Premier Ministre haïtien Ariel Henry a sollicité l’intervention d’une force étrangère pour rétablir l’ordre. Or de nombreux citoyens haïtiens s’opposent fermement à cette initiative. Le pays a subi de nombreuses interventions étrangères dans son passé, qui n’ont souvent fait que rendre la vie des haïtiens plus difficile. Alors même qu’un soutien international reste nécessaire pour Haïti à long terme,  cette aide doit néanmoins être guidée par les voix de la société civile locale. Les OSC ont la capacité de garantir que l’aide internationale contribue à développer la capacité des Haïtiens à prendre le contrôle de leur situation et trouver leurs propres solutions.

Le message était fort et clair : « A bas Ariel Henry, à bas l’occupation ». Le 10 octobre, des milliers de personnes ont défilé sous cette bannière dans les rues de la capitale haïtienne de Port-au-Prince comme dans d’autres villes en réponse à l’appel du gouvernement à une intervention étrangère.

Une crise aux multiples facettes

M. Henry est devenu le dirigeant par intérim d’Haïti après l’assassinat du président Jovenel Moïse en juillet 2021. Suite à la prise de contrôle d’un terminal de carburant clé par des groupes criminels en signe de protestation contre les prix de l’essence, il s’est adressé à la nation pour tenter de justifier sa demande d’intervention étrangère.

Le 11 septembre, Henry a annoncé que le gouvernement ne pouvait plus se permettre de subventionner les carburants. Cette décision a déclenché une vague d’émeutes et le pillage d’entrepôts remplis d’aide alimentaire. Des gangs ont riposté en prenant le contrôle des réserves de carburant. Parmi leurs exigences figurait notamment la destitution de M. Henry et de plusieurs ministres du gouvernement.

L’occupation du dépôt de Varreux a paralysé le pays. Cet acte a d’autant plus aggravé une crise marquée par l’insécurité, l’inflation et les pénuries d’eau, d’aliments et de carburant. De même, les hôpitaux et les entreprises de traitement des eaux ont été empêchés de fonctionner, tout ce dans un contexte d’épidémie de choléra.

De plus, la crise haïtienne s’est produite dans le contexte de la guerre de la Russie en Ukraine, dans un pays où 20 % de l’approvisionnement alimentaire provient des importations. Environ 4,7 millions d’Haïtiens, soit près de la moitié de la population, souffrent d’une faim aiguë.

Ces dernières années ont été marquées par un essor des gangs armés. Par ailleurs, l’assassinat de Moïse a créé un vide politique. En l’absence de forces de sécurité adéquates et d’un système exécutif et judiciaire capable de faire respecter la loi, environ 200 groupes criminels ont pris le contrôle d’une grande partie de Port-au-Prince et des principaux axes de communication. Les gangs, mieux équipés que la police, se livrent à une campagne systématique d’enlèvements contre rançon : selon la Mission des Nations Unies (ONU), rien qu’au cours des six premiers mois de 2022 680 personnes ont été enlevées, 934 ont été tuées et 684 blessées par les gangs.

En début juillet, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a signalé qu’au moins 52 femmes et filles, dont certaines n’avaient pas plus de dix ans, avaient été victimes de viols collectifs au cours de plusieurs semaines d’affrontements entre gangs à Port-au-Prince. Rien qu’en septembre, au moins 20 000 Haïtiens auraient été déplacés de chez eux en raison des violences. Des enfants sont recrutés par les gangs.

Les gens ont répondu en protestant contre les multiples éléments de la crise qu’ils subissent, notamment la criminalité, la négation des droits fondamentaux, la pauvreté et les pénuries de produits de première nécessité, tout en réclamant un changement de direction. Ces dernières semaines, les manifestations se sont multipliées. Le 3 octobre, par exemple, des milliers de personnes ont défilé contre le gouvernement, situation à laquelle la police a répondu par l’usage de gaz lacrymogènes.

Poussées par la gravité de la situation, de nombreuses personnes se sont vues contraintes de partir. Or cette décision les force à emprunter des routes migratoires très dangereuses : ces dernières années, de nombreux Haïtiens sont décédés dans la traversée des Caraïbes pour atteindre les États-Unis. En juillet, 17 personnes se sont noyées lorsqu’un bateau transportant des dizaines de migrants a chaviré près des côtes des Bahamas. Une tragédie similaire s’était produite près des côtes de Porto Rico deux mois plus tôt, où 11 personnes ont perdu la vie.

Les agences de l’ONU ont appelé les pays d’accueil à s’abstenir de renvoyer de force les ressortissants haïtiens et à évaluer correctement les demandes d’asile, mais les États-Unis, pays vers lequel la plupart des Haïtiens cherchent à fuir, appliquent une politique de déportations massives et de contrôle rigide des frontières. Depuis la pandémie, les États-Unis invoquent le « Title 42 », un dispositif de santé publique qui permet d’expulser les migrants à la frontière mexicaine pour des raisons de contrôle sanitaire. L’année dernière, cela a forcé plus de 19 000 Haïtiens à rentrer chez eux. Les États-Unis défendent donc l’intervention au nom de la situation sécuritaire en Haïti tout en continuant de renvoyer des personnes là-bas.

Le gouvernement demande une intervention

Le 9 octobre, M. Henry a officiellement demandé au Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, d’approuver le déploiement immédiat d’une force armée spécialisée, soutenant que cette demande constituait une réponse aux troubles sécuritaires causés par les gangs armés.

Dans un geste de soutien, le Canada et les États-Unis ont fourni à la police locale haïtienne des véhicules blindés. M. Guterres a demandé un déploiement de forces afin d’assurer l’ouverture d’un couloir humanitaire et reprendre la distribution de carburant, d’eau et d’aliments. L’intervention armée demeure cependant controversée.

Le 17 octobre, les gouvernements du Mexique et des États-Unis ont présenté au Conseil de sécurité des Nations unies une résolution proposant une « mission non onusienne soigneusement délimitée et dirigée par un pays partenaire » pour rétablir l’ordre. Mais Helen La Lime, Chef du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti, s’est prononcée en faveur d’une solution locale. Selon elle, une intervention armée ne sera pas suffisante pour faire face aux multiples facettes de la crise actuelle du pays.

Vue de l’extérieur, la décision d’Henry de demander de l’aide internationale peut sembler raisonnable, compte tenu de l’ampleur des problèmes. Mais les Haïtiens se souviennent de la longue et troublante histoire de leur pays en matière d’intervention étrangère et ne voient pas comment cela va résoudre leurs problèmes.

Une histoire d’interventions ratées

Haïti a déclaré son indépendance de la France en 1804. Premier pays d’Amérique latine à se libérer du joug colonial, Haïti est devenu la première République noire libre du monde, fondée par des esclaves affranchis. Mais elle a littéralement payé un lourd tribut pour la liberté : La France a exigé des compensations punitives massives, y compris pour la perte d’esclaves, et a imposé au pays des dettes énormes qu’il a fallu 122 ans pour rembourser. Cette situation a eu des effets dévastateurs sur le jeune État indépendant, provoquant une pauvreté et un sous-développement qui se font encore ressentir aujourd’hui.

Les États-Unis, dont l’économie reposait sur l’esclavage, ont refusé toute reconnaissance diplomatique pendant des décennies, cherchant à isoler Haïti sur le plan international. Ensuite en 1915, quand le président Vilbrun Guillaume Sam a été assassiné, les forces armées américaines ont commencé une occupation brutale qui a duré 19 ans. Cette occupation a été précédée par une prise de contrôle par les États-Unis de la Banque nationale d’Haïti. Pendant l’occupation, les responsables américains ont modifié la Constitution haïtienne afin de prendre le contrôle de sa Trésorerie et de sa douane, garantissant ainsi la sortie des ressources d’Haïti au lieu de leur contribution à son développement. Le déploiement armé a donné lieu à deux décennies de discrimination raciale et de répression.

Par la suite, les intérêts nationaux des Etats-Unis sont demeurés au centre de leurs relations entretenues avec Haïti. Le gouvernement despotique et corrompu de François « Papa Doc » Duvalier et de son fils Jean-Claude « Baby Doc » a été toléré par le gouvernement américain parce qu’Haïti se positionnait comme un rempart contre la propagation du communisme depuis Cuba.

L’ingérence s’est poursuivie sous la présidence de Jean-Bertrand Aristide, le premier président haïtien démocratiquement élu, qui a été destitué quelques mois seulement après son entrée en fonction en 1991. Des forces financées par la Central Intelligence Agency des États-Unis auraient été impliquées dans la destitution.

Les États-Unis ont soutenu son retour en 1994, suite à une opération militaire menée par les forces américaines et ses alliées et autorisée par l’ONU. Aristide remporte à nouveau la présidence en 2001, mais une violente insurrection commencée la même année le contraint à fuir en 2004. En 2022, l’ancien ambassadeur de France en Haïti a déclaré que le coup d’État avait été orchestré par la France et les États-Unis, en partie en réponse aux exigences d’Aristide tendant à ce que la France paye des réparations pour l’argent qu’elle avait soutiré à Haïti.

Même après le tremblement de terre dévastateur de 2010 qui a fait environ 220 000 morts, l’ingérence politique s’est poursuivie. Lors de l’élection présidentielle ajournée, dont le premier tour a eu lieu en novembre 2010 et le second en mars 2011, l’ancien président américain Bill Clinton, alors envoyé spécial des Nations Unies en Haïti, et la secrétaire d’État des États-Unis de l’époque, Hillary Clinton, ont tous deux soutenu activement la candidature de Michel Martelly. Les États-Unis figuraient parmi les États faisant pression pour la tenue d’élections, même si de nombreuses personnes étaient privées de leurs droits, ayant perdu leur maison et tous leurs documents lors du tremblement de terre.

Bien qu’il soit initialement arrivé en troisième place, Martelly est passé au second tour qu’il a ensuite remporté à la suite d’une révision controversée de l’élection par l’Organisation des États américains (OEA). Le gouvernement de Martelly a été marqué par une corruption endémique et des abus de pouvoir, mais cela n’a aucunement fait vaciller le soutien du gouvernement américain. Ce soutien a concerné ensuite le successeur nommé par Martelly, Moïse, qui a été président de 2017 jusqu’à son assassinat en 2021.

L’histoire de l’intervention de l’ONU est également regrettable. Les premières forces de l’ONU sont arrivées en 1994, puis la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) s’est installée dans le pays après le deuxième coup d’État contre Aristide en 2004. Elle est restée jusqu’en 2017, date à laquelle une force plus petite, la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti, a pris sa place. Celle-ci a été remplacée à son tour par le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti. En juillet, le Conseil de sécurité de l’ONU a prolongé son mandat d’une année supplémentaire et a augmenté ses effectifs.

La MINUSTAH était présente dans le pays depuis trois ans lorsqu’elle a été accusée d’être impliquée dans un important scandale d’abus sexuels. Des casques bleus, dont un contingent du Sri Lanka, ont été accusés d’abus sexuels et d’exploitation sexuelle de la population locale, y compris des enfants. De nombreuses jeunes filles sont tombées enceintes à cause de cela et ont été abandonnées.

Ce scandale a été suivi d’une épidémie de choléra, la première dans l’histoire d’Haïti, qui a débuté en 2010. Environ 10 000 personnes sont mortes. La maladie a été attribuée à des casques bleus du Népal.

Lorsqu’il est apparu que l’ONU avait apporté le choléra en Haïti, les gens sont descendus dans la rue pour manifester pendant plusieurs jours contre l’ONU. L’ONU a été accusée d’avoir tenté de dissimuler sa culpabilité et de manque d’efficacité et de volonté d’agir. Finalement, en 2016, le secrétaire général de l’époque, Ban Ki-moon, a présenté des excuses publiques auprès d’Haïti et a annoncé la création d’un fonds fiduciaire de 400 millions de dollars pour aider les victimes. Mais l’ONU a refusé d’accepter la responsabilité légale de l’épidémie, et pratiquement aucun des fonds promis n’a été collecté ni dépensé. Maintenant, le choléra est de retour.

Les Haïtiens ont également des raisons de se méfier des organisations de la société civile (OSC) internationales. L’énorme effort d’aide qui s’est mobilisé après le tremblement de terre de 2010 n’a pratiquement rien fait pour aider à développer la résilience locale et la capacité des communautés à répondre aux crises. En 2018, le gouvernement a interdit à Oxfam d’opérer dans le pays à la suite d’allégations d’inconduite sexuelle de la part de son personnel en Haïti. L’organisation avait licencié le personnel impliqué en 2011, mais a ensuite été accusée d’avoir dissimulé des faits dans son enquête.

D’autres OSC internationales ont également été accusées de fautes graves. Il n’est donc pas étonnant que de nombreux Haïtiens se méfient des interventions extérieures.

Les voix de ceux en première ligne

Monique Clesca est journaliste, défenseuse de la démocratie et membre de la Commission pour la recherche d’une solution haïtienne à la crise.

 

En début 2021 le Groupe Montana s’est fondé sur l’idée que la société civile devait s’impliquer car les acteurs politiques ne pouvaient pas trouver de solution aux problèmes d’Haïti. Un forum de la société civile a donc formé une commission qui a travaillé pendant six mois pour créer un dialogue et tenter de dégager un consensus en s’adressant à tous les acteurs politiques, ainsi qu’aux organisations de la société civile. Grâce à toutes ces contributions, nous avons abouti à un projet d’accord qui a été finalisé et signé par près d’un millier d’organisations et de citoyens : l’Accord de Montana.

Nous avons élaboré un plan composé de deux parties : d’une part un plan de gouvernance et d’autre part une feuille de route pour la justice sociale et l’aide humanitaire, qui a été signée dans le cadre de l’accord. Pour obtenir un consensus avec une participation plus large, nous avons proposé la création d’un organe de contrôle qui jouerait le rôle du pouvoir législatif et d’un pouvoir judiciaire intérimaire pendant la transition. Une fois qu’Haïti aura organisé des élections transparentes, il y aura un organe législatif dûment élu et le gouvernement pourra passer par le processus constitutionnel pour nommer le plus haute juridiction, la Cour suprême. Tel est le modèle de gouvernance que nous avons envisagé pour la transition, dans une tentative de rapprochement à l’esprit de la Constitution haïtienne.

Le principal défi à relever pour l’organisation des élections est l’insécurité généralisée. Les gangs terrorisent la population. Les enlèvements ainsi que les assassinats sont monnaie courante. Les gens ne peuvent pas sortir de chez eux : ils ne peuvent pas aller à la banque, dans les magasins, ni même à l’hôpital. Les enfants ne peuvent pas aller à l’école : la rentrée était prévue pour septembre, puis a été reportée jusqu’à octobre, et maintenant le gouvernement n’annonce même pas quand elle aura lieu.

En outre, il y a une situation humanitaire désastreuse en Haïti. Il y a aussi une polarisation politique et une méfiance généralisée.

En raison de la pression politique et de l’activité des gangs, les mobilisations citoyennes ont été inconstantes. Or depuis fin août, des manifestations massives ont été organisées pour demander la démission d’Ariel Henry.

Henry n’a aucune légitimité pour demander une intervention militaire. La communauté internationale peut aider, mais ne peut pas prendre la décision d’intervenir ou pas. Nous devons d’abord avoir une transition politique de deux ans avec un gouvernement crédible. Nous avons des idées, mais à ce stade nous avons besoin de voir cette transition.

 

Ceci est un extrait édité de notre conversation avec Monique. Lisez l’entretien complet ici.

La société civile doit participer à la conversation

Pendant ce temps, la situation politique à l’intérieur du pays reste aussi désordonnée et déchirée par les intérêts personnels que jamais. Les élections ont été retardées et selon une bonne partie de l’opinion publique, Henry manque de légitimité.

Au début de l’année 2020, Moïse a commencé à gouverner Haïti par décret. Il a suspendu les élections et prévu un référendum pour réviser la Constitution. Cette révision aurait élargi le pouvoir présidentiel et limité le rôle du parlement, octroyant éventuellement à Moïse la possibilité de se présenter à de nouvelles élections et d’exercer plus de mandats. Le référendum proposé a été reporté à plusieurs reprises depuis l’assassinat de Moïse.

Quant à l’enquête sur son assassinat, il y a eu de nombreuses pistes d’investigation et quelques procès, mais les cerveaux de l’opération continuent d’échapper à la justice. Henry fait partie des personnes soupçonnées d’être impliquées dans cet assassinat. Au moment de l’assassinat, il avait été nommé Premier ministre d’Haïti, mais n’avait pas encore prêté serment. La situation était compliquée car le parlement était en suspens en raison de la non-tenue des élections législatives. Le Premier ministre par intérim, Claude Joseph, a initialement assumé la fonction de Président par intérim, mais ce rôle a été contesté à la fois par Henry et par le président du Sénat, Joseph Lambert.

M. Henry a pris la direction d’Haïti après l’intervention du « Core Group », composé de diplomates du Brésil, de la France, de l’Allemagne, de l’Espagne et des États-Unis, ainsi que de l’Union européenne et de l’OEA. Il est resté dans ce rôle depuis, au-delà de la fin officielle de son mandat en février, et le restera jusqu’à la tenue d’élections. Il est le dirigeant de facto pour lequel aucun citoyen haïtien n’a voté, mais que les États étrangers ont choisi.

Des puissances extérieures, notamment les Nations Unies et les États-Unis, souhaitent vivement que soit établie une feuille de route pour les élections. Alors que dans d’autres contextes cet appel serait soutenu avec enthousiasme par la société civile, de nombreux activistes remettent en question cette pression et appellent à la prudence. Selon eux, précipiter les élections alors que les défis sont nombreux, notamment en ce qui concerne l’inscription des électeurs, l’indépendance des organes électoraux et les problèmes de sécurité manifestes, compromettrait les perspectives d’une transition démocratique qui est à ce jour indispensable.

La société civile doit s’impliquer car les acteurs politiques ne peuvent pas trouver de solution à nos problèmes.

MONIQUE CLESCA

Afin d’élaborer une solution consensuelle qui permette de rétablir les droits démocratiques, la société civile préconise une approche participative et inclusive. Après l’assassinat du président Moïse, la Commission pour la recherche d’une solution haïtienne à la crise, formée par quelques 365 organisations haïtiennes, dont des groupes religieux, des groupes juridiques et des syndicats, a signé une lettre ouverte exhortant les partenaires internationaux d’Haïti à considérer la société civile locale comme une partie prenante essentielle à la résolution de la crise.

Le groupe a ainsi présenté l’Accord de Montana tendant à la mise en place d’un gouvernement provisoire qui pourrait conduire à des élections transparentes, libres et équitables. La société civile qui a participé à cet appel estime que seuls des processus locaux visant à développer un large consensus politique peuvent rétablir la sécurité, la justice et la stabilité sociale.

Jusqu’à présent, Henry ne semble pas être à l’écoute. Au contraire, il semble vouloir profiter du clivage politique afin de rester au pouvoir en se présentant comme candidat de la stabilité et gagnant ainsi le soutien international. Les partenaires internationaux d’Haïti semblent être sur la même longueur d’onde, prêts à soutenir celui qui détient actuellement le pouvoir à tout prix, y compris par le soutien militaire, en ce que cela constituerait à leurs yeux une alternative souhaitable à l’anarchie.

Le gouvernement américain a récemment inclus Haïti comme pays prioritaire dans le cadre du Global Fragility Act. Cette décision insuffle un certain espoir, certes prudent, compte tenu de l’histoire des États-Unis dans le pays. Il s’agit d’une tentative de promotion de la stabilité à long terme en s’attaquant aux vulnérabilités à l’origine de la violence. Plutôt que de proposer principalement une intervention armée, ce dispositif vise à prévenir les conflits en se concentrant sur la gouvernance.

La loi dispose que le gouvernement américain doit travailler avec une variété de partenaires locaux, y compris la société civile, pour engendrer des solutions façonnées par une diversité de voix. En soi, ce n’est pas suffisant, mais c’est un bon point de départ qui vise à signaler un principe clé: il sera impossible d’avancer sans la société civile haïtienne.

NOS APPELS À L’ACTION

  • Les partenaires internationaux doivent s’engager à travailler avec la société civile locale pour élaborer une feuille de route pratique et inclusive pour la transition démocratique.
  • L’aide internationale vers Haïti doit être bien ciblée afin de garantir la satisfaction des besoins humanitaires urgents, tout en rétablissant l’État de droit, l’accès à la justice et la sécurité.
  • Les gouvernements qui accueillent des migrants et des réfugiés d’Haïti doivent s’engager à mettre fin aux expulsions, en s’efforçant plutôt à accueillir et à soutenir les haïtiens.

Photo de couverture par Reuters/Ricardo Arduengo via Gallo Images